Les documents administratifs et judiciaires ou tout autre acte juridique émis en Algérie n’étant pas reconnu à l’étranger et ne peuvent de ce fait y produire aucun effet , et à l’inverse ceux émis par un Etat étranger n’étant pas reconnu en Algérie, il faudrait pour que ces documents y soient légalement valables recourir à la procédure de légalisation qui consiste en une chaîne de certifications, par une ou plusieurs autorités de l'État où le document a été délivré et de l'État de destination. Cette procédure de légalisation est lourde et complexe.Ainsi si le ressortissant algérien veut exciper dans une procédure pendante devant une autorité étrangère d’un document ( par exemple un jugement , un casier judiciaire, un acte de mariage , un acte de naissance , un certificat de scolarité ,un diplôme ou encore une attestation de travail ) , elle peut le faire à condition que ce document soit légalisé .
S’il s’agit d’un document administratif ,le porteur de cet acte doit en premier lieu le faire légaliser par le ministère algérien des affaires étrangères , puis le soumettre au consulat du pays dans lequel ce document est destiné pour une certification. S’il s’agit d’un jugement rendu par une juridiction ,la procédure de légalisation est plus complexe. Le jugement doit d’abord être présenté pour légalisation au président du tribunal de la juridiction qui l’a rendu , puis au procureur général de la cour dont dépend ce tribunal , ensuite être certifié par le ministère algérien des affaires étrangères et enfin soumis à la légalisation du consulat du pays destinataire. Autant dire un vrai parcours du combattant illustré entre autres par les chaines interminables qui se succèdent devant le service de légalisation du ministère algérien des affaires étrangères .
De son côté le ressortissant étranger qui veut faire reconnaitre devant une autorité algérienne la validité d’un acte juridique émis dans son pays doit suivre le même parcours , c’est à dire légaliser cet acte par les autorités compétentes avant de le soumettre à l’approbation du consulat d’Algérie.Pour un belge par exemple, il doit légaliser le document qu’il souhaite exciper devant une autorité algérienne par l’instance belge compétence , puis par le ministère des affaires étrangères belge et enfin par le consulat d’Algérie en Belgique.
C’est pour simplifier cette procédure de légalisation des actes publics étrangers que la Convention de La Haye du 5 octobre 1961 relative à l'apostille connue sous le nom de Convention Apostille a été adoptée par la Conférence de La Haye de droit international privé ( HCCH) et soumise à signature et ratification. Cette convention ratifiée à ce jour par 126 pays simplifie d’une façon remarquable la procédure de légalisation des actes publics et soulage les ressortissants des pays signataires des lenteurs et des frais de la légalisation de droit commun.Contrairement à la légalisation normale ,il n'est pas nécessaire en vertu des dispositions de cette convention internationale d'effectuer une double formalité auprès des autorités algériennes d'une part, et auprès des autorités de l'Etat sur le territoire duquel l'acte doit produire ses effets d'autre part. En effet, en application de l'article 3 de cette convention, la seule formalité exigée pour attester de la véracité de la signature, de la qualité en laquelle le signataire de l'acte a agi, et le cas échéant, de l'identité du sceau ou du timbre dont cet acte est revêtu, est l'apposition de l'apostille par l'autorité compétente de l'Etat d'où émane le document.
La Convention Apostille s’applique à tous les actes publics qui ont été établis sur le territoire d'un Etat contractant , et qui doivent être produits sur le territoire d'un autre Etat contractant notamment les documents qui émanent d'une autorité ou d'un fonctionnaire relevant d'une juridiction de l'Etat y compris ceux qui émanent du ministère public, d'un greffier ou d'un huissier de justice , les documents administratifs , les actes notariés mais aussi les déclarations officielles telles que mentions d'enregistrement, visas pour date certaine et certifications de signature, apposées sur un acte sous seing privé. L'apostille est délivrée sans frais à la requête du porteur de l’acte par l'autorité compétente de l'Etat où l'acte est passé et généralement il s’agit du procureur général de la cour du ressort de l'autorité qui a conféré à l'acte son caractère d'acte public .L’apostille prend la forme d'un cachet sur le document à apostiller conforme au modèle annexé à la Convention de La Haye attestant de la véracité du sceau et de la signature de l'autorité qui a conféré à l'acte son caractère d'acte public.
Au regard des avantages indéniables de la Convention Apostille pour les ressortissants des pays signataires , sa non ratification par l’Algérie alors que plus de 120 pays l’ont ratifié dont l’Egypte , la Tunisie, le Maroc ou très récemment l’Arabie Saoudite , soulève des questionnements , et ce alors même que plus que ces pays , l’Algérie possède l’une des plus importantes diasporas au monde qui par ce statut ont souvent recours à la légalisation d’actes susceptibles d’être produits dans leurs pays d’accueil. Indéniablement , la ratification par l’Algérie de ce traité facilitera grandement la vie de ses citoyens , aussi il est pour le moins anormal que ni les représentants officiels des algériens à l’étrangers notamment au sein des deux chambre du parlement algérien , ni les hauts fonctionnaires du ministère algérien des affaires étrangères qui tout au long de l’année voient défiler des centaines de concitoyens en quête d’une légalisation, n’aient pensé à proposer à qui de droit la l’adhésion à cette convention .
Il est à remarquer que la Convention Apostille a été adoptée et mise en œuvre sous l’égide de la Conférence de la Haye de droit international privée ( HCCH) qui est une organisation intergouvernementale créée en 1965 dont le mandat consiste à l’unification progressive des règles de droit international privé . Cette organisation intergouvernementale a élaboré une vingtaine de conventions internationales actuellement en vigueur de même importance que la Convention Apostille à l’instar de la Convention Notification du 15 novembre 1965 relative à la signification et la notification à l’étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale ,la Convention Preuves du 18 mars 1970 sur l’obtention des preuves à l’étranger en matière civile ou commerciale , la Convention Accès à la justice du 25 octobre 1980 tendant à faciliter l’accès international à la justice , ou encore la Convention Jugements du 2 juillet 2019 sur la reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers en matière civile ou commerciale. Alors que les membres de la HCCH sont au nombre de 90 dont l’Egypte ,la Tunisie ou le Maroc , et que 60 autres pays sont en attente d’adhésion ou ont signé, ratifié ou adhéré à une ou plusieurs conventions de la HCCH , l’Algérie n’a pas encore proposé sa candidature à une éventuelle adhésion à cette organisation intergouvernementale.
Maitre BRAHIMI Mohamed
Avocat à la cour de Bouira
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