A contrario les jugements rendus en matière de délits ayant prononcé une peine égale ou inferieure à 20 000 dinas et les jugements rendus en matière de contravention n’ayant prononcé qu’une peine d’amende ne sont plus susceptibles d’appel .Le nouvel article 416 du code pénal favorable au prévenu mais qui lèse la partie civile a suscité des interprétation divergentes.
L’application de cette nouvelle disposition pénale par les juridictions d’appel a soulevé une difficulté et une controverse non pas sur la pertinence d’une telle disposition qui interdit au prévenu l’exercice d’une une voie de recours ordinaire contre le jugement de condamnation , mais sur le recevabilité de l’appel d’un tel jugement par de la partie civile dans l’hypothèse où cette dernière s’est constitué partie civile et où sa demande d’indemnisation du dommage induit par l’infraction a été soit rejetée soit totalement soit partiellement. La partie civile est-elle recevable à faire appel d’une telle décision ayant prononcé une peine correctionnelle égale ou inferieure à 20 000dinars ou une peine contraventionnelle d’amende ? L’irrecevabilité de l’appel du ministère public ou du prévenu posée par l’article 416 du code pénal induit-il d’office l’irrecevabilité de l’appel par la partie civile ?
La cour de Bouira dans plusieurs arrêts a répondu par la négative et a a jugé que l’appel de la partie civile est recevable quant bien même le jugement a prononcé une peine égale ou inferieure à 20 000 dinars .Il s’agissait dans les cas d’espèce de jugements rendus par le tribunal correctionnel ayant condamné le prévenu à une peine d’amende de 20 000 dinars pour soustraction frauduleuse d’électricité conformément à l’article 350 du code pénal et où la partie civile n’a été indemnisée qu’à hauteur de 10 000 DA alors qu’elle a sollicité 100 000 dinars. Sur le seul appel de la partie civile , la cour a modifié le jugement dont appel et a augmenté le montant de l’indemnisation à 20 000dinars.
Ces arrêts sont t-il conformes à la lettre et à l’esprit de l’article 416 du code pénal ? Le but affiché par les concepteurs de cette nouvelle disposition étant le désengorgement du rôle des juridictions pénales , ouvrir le droit d’appel à la partie civile ne contredit-il pas l’esprit de la loi ? En outre le principe selon lequel « le jugement prononçant une peine égale ou inferieure à 20 000 dinars n’est pas susceptible d’appel » n’induit-il pas nécessairement que cette irrecevabilité s’applique à toutes les parties au procès (prevenu, partie civile, civilement responsable) ? On peut soutenir ce point de vue . Mais suivant un autre raisonnement beaucoup plus pertinent juridiquement , rien n’empêche la juridiction d’appel de déclarer recevable l’appel de la partie civile malgré la disposition de l’article 416 peut être défendue.
Tout d’abord si le législateur a voulu interdire l’appel y compris pour la pour la parte civil , il aurait expressément mentionné cette interdiction dans l’article 416 comme il l’a fait pour le pourvoi en cassation où il a interdit ce recours contre les arrêts et jugements rendus en dernier ressort en matière de délits ayant prononcé une peine d’amende égale ou inferieure à 50 000 DA pour la personne physique et 200 000 DA o pour la personne morale avec ou sans réparation civile. Ici le législateur et pour éviter toute autre interprétation a pris soin de mentionner que l’interdiction concerne aussi la partie civile.
En outre l’action civile étant distincte de l’action public, rien n’empêche la juridiction pénale de juger cette action sur le seul appel de la partie civile même si le jugement n’est pas susceptible d’appel sachant qu’une jurisprudence constante permet à la partie civile de faire appel du jugement de relaxe du prévenu même en l’absence d’appel du ministre public.Les arguments ayant motivé cette jurisprudence pour autoriser la juridiction d’appel de juger l’action civile même en cas de relaxe peuvent être transposés au cas où seul la partie civile a interjeté appel du jugement non susceptible d’appel en vertu de l’article 416 .
Nous penchons donc vers la recevabilité de l’appel de la partie civile non seulement au regard des arguments sus-dessus mais aussi au fait que toute restriction au droit d’appel , que ce soit celui du prévenu ou celui de la partie civile , ne peut qu’être préjudiciable à la justice et à l’équité .Il ne peut en être autrement que si la disposition de loi n’autorise aucune interprétation ce qui n’est pas le cas de l’article 416 du code pénal.
En attendant une décision de la cour suprême sur la question qui fera certainement jurisprudence, L’article 416 du code pénal continuera à susciter une controverse sur la question de la recevabilité de l’appel de la partie civile au gré des décisions des juridictions appelées à trancher ce genre d’appel.