Le principe est qu’une société non viable doit disparaître. Sa liquidation doit être la sanction inéluctable, à fortiori si elle a été gérée d’une façon maladroite. Mais que ce soit en Algérie ou ailleurs, une société n’est déclarée en état de faillite et liquidée que si son sauvetage s’avère impossible. Les mécanismes prévus par le code de commerce algérien en cas de cessation de paiements d’une société sont la faillite et le règlement judiciaire , ce dernier mécanisme étant un régime de faveur fait à la société et au commerçant de bonne foi victime des circonstances économiques.
Il faut dorés et déjà remarquer que la législation algérienne en matière de droit de faillite est désuète et complètement en décalage avec l’économie moderne .Seuls la faillite et le règlement judicaire ont été prévus ,et il n’existe pas de procédure spécifique de conciliation ou de sauvegarde des sociétés en difficulté. Le droit algérien des entreprises en difficulté reste largement marqué par la méfiance vis-à-vis de l’entrepreneur failli .Son esprit général est de punir le chef d’entreprise qui n’a pas su gérer convenablement son entreprise , et cette punition peut même aboutir à son incarcération en cas de banqueroute. Il est à remarquer que le code de commerce algérien traite des deux mécanisme dans le même titre intitulé « Des faillites et règlements judiciaires ».
Le législateur algérien s’est largement inspiré des lois de faillite en vigueur en France notamment le code de commerce français de 1807 et le décret de 1955 qui distinguaient le règlement judicaire de la faillite. Mais alors qu’en France ,comme d’ailleurs dans d’autres pays voisins come la Tunisie ou le Maroc , est né un droit moderne des procédures collectives initié par la loi et l’ordonnance de 1967 et conforté par les lois de 1985 relatives à la prévention des difficultés des entreprises , au règlement amiable et au redressement judicaire, en Algérie la législation est restée figée.
Les quelques amendement apportés au code de commerce algérien notamment par le décret législatif du 25 avril 1993 n’ont touché que la forme laissant tels quels les mécanismes anciens. Cet article en plusieurs parties sera consacré à la faillite et sera suivi ultérieurement par le règlement judicaire.
LA FAILLITE
Le code de commerce organise à côté de la faillite proprement dite un autre système de liquidation plus rapide et moins sévère sous le nom de règlement judiciaire.Il apparaît que c’est la faillite qui est le mode normale de liquidation des entreprises en difficulté et que le règlement judicaire doit être mérité et le failli pour en bénéficier doit remplir certaines conditions. Les différences avec la faillite sont sensibles.Le débiteur n’est pas dessaisi de la gestion de son patrimoine comme c’est la cas dans la faillite ; il continue à le gérer pour le profit de la masse des créanciers avec l’assistance et la surveillance du syndic ( article 277-1 C.com). C’est donc le débiteur lui-même qui est chargé de liquider sa situation. Le règlement judicaire est en fait calqué sur la faillite. C’est une sorte de faillite adoucie.
1 - Déclaration de faillite
En application de l'articles 215 du code de commerce. : « Tout commerçant, toute personne morale de droit privé ,même non commerçante qui cesse ses paiements, doit, dans les quinze jours, en faire la déclaration en vue de l’ouverture d’une procédure de règlement judiciaire ou de faillite ».En outre l'article 217 alinéa 2 du même code soumet les sociétés à capitaux totalement ou partiemlement publics au régime de la faillite et du règlement judiciaire. Deux conditions doivent donc être réunies pour qu’il puisse y avoir faillite : 1° la qualité de commerçant ou de personne morale chez le débiteur ; 2°cessation des paiements. Au vu des graves conséquences résultant de l’état de faillite , la loi veut qu’elle soit constatée par le tribunal ( article 222 C.com.).
1-1- Les conditions de la déclaration de faillite
Seul le commerçant ou la personne morale de droit privé peut être déclaré en faillite. Est réputé commerçant d’après l’article 1 du code de commerce : « Toute personne physique ou morale qui exerce des actes de commerce et en fait sa profession habituelle ».Il reviendra au tribunal chargé de déclarer la faillite le soin de décider si le débiteur est ou non commerçant. Mais s’il s’agit d’une personne morale de droit privé cette seule qualité suffit pour la déclarer en faillite sans qu’il soit besoin de rechercher si elle se livre à des opérations commerciales. Les sociétés à capitaux totalement ou partiellement publics sont elles aussi soumises à la faillite et c’est ce qu’indique expressément l’article 217 du code de commerce .La faillite ne s’applique pas aux personnes incapables de faire le commerce ( individu sous tutelle ou curatelle, mineur non émancipé…) ni aux personnes auxquelles le commerce est interdit par la loi à raison de leur profession ( avocats,notaires ,huissiers de justice…).
La déclaration de faillite suppose en deuxième lieu la cessation des paiements. La gêne momentanée et même l’insolvabilité du commerçant n’est pas suffisante pour le faire considérer comme se trouvant légalement en état de faillite du moment que son crédit est maintenu et qu’il parvient plus ou moins à honorer ses engagements vis à vis de ses creanciers.Pour qu’il y ait cessation de paiements ,il faudrait qu’il y ait impossibilité absolue de payer de telle sorte qu’il est devenu impossible au commerçant de continuer son commerce. Ainsi la cessation de paiements accidentelle ou temporaire ne suffit pas pour déterminer une faillite et fixer la date de son ouverture. La créance revendiquée doit être sérieuse ,certaine et exigible sinon le commerçant ne peut être déclaré en faillite. Le tribunal appelé à statuer sur la déclaration de faillite peut utiliser tous moyens de preuve pour asseoir sa conviction : protêts, assignations, jugements de condamnation, saisies, aveu du débiteur dans une lettre adressée à ses créanciers, fermeture des magasins, disparition du débiteur…
Les deux conditions : qualité de commerçant ou de personne morale de droit privé sont donc suffisantes pour déclarer l’état de faillite mais cet état de faillite nécessite t-il au préalable un jugement déclaratif de faillite ? En d’autre terme y a t-il une faillite légale résultant de la simple cessation de paiements ou bien la faillite ne peut être que judiciaire ?La question a soulevé une controverse sous l’ancienne législation antérieure au code de commerce mais ce dernier a tranché la question. Ainsi en vertu de l’article 225 du code de commerce : « En l’absence de jugement déclaratif , la faillite ne résulte pas du fait de la cessation des paiements », mais en vertu du deuxième alinéa du même article : « Une condamnation peut être prononcée pour banqueroute simple ou frauduleuse sans que la cessation des paiements ait été constatée par un jugement déclaratif ».La faillite est donc toujours judiciaire à l’exception de l’effet de banqueroute qui peut être constaté quant bien même un jugement déclaratif de faillite n’ait pas été rendu.
1-2 - Le jugement déclaratif de faillite
1-2-1-Le tribunal compétent pout déclarer la faillite
La cessation de paiements par un commerçant ou par une personne morale de droit privé est de nature à amener la mise en faillite de ces derniers. C’est la section commerciale du tribunal qui est compétente pour vérifier l’existence de ces deux conditions.Quant au tribunal territorialement compétent c’est en principe celui du domicile du défendeur , mais s’il s’agit de faillite de sociétés le tribunal territorialement compétent est celui de l’ouverture de la faillite ou celui du lieu di siège social au choix du demandeur ( art.37 et 40 al.3 C.p.c.a.)
1-2-2- formalité s de la déclaration de faillite
En vertu des article 215 et 216 du code de commerce ,la déclaration en vue de l’ouverture d’une procédure de faillite doit être provoquée par le failli lui-même dans les 15 jours de la cessation des paiements , et à défaut de provocation de sa part elle est prononcée sur la poursuite d’un créancier, ou d’office par le tribunal.
1-2-2-1- Déclaration par le failli lui-même
La déclaration en vue de l’ouverture d’une procédure de faillite est reçue par le greffier du tribunal .Cette déclaration relate les renseignements sur le failli tels que son domicile ,ses divers établissements commerciaux ou magasins et l’époque de la cessation des paiements. En même temps que la déclaration de cessation des paiements, le failli doit y joindre outre le bilan, le compte d’exploitation général, le compte de résultats ainsi que l’état des engagements hors bilan du dernier exercice .Il doit en outre présenter un état de situation, l’état des engagements hors bilan, l’état chiffré des créances et des dettes ,l’inventaire sommaire des biens de l’entreprises et s’il s’agit d’une société comportant des associés responsables solidairement des dettes sociales, la liste de ces associés ( art. 218 C.com.).
La déclaration doit être faite par le commerçant lui-même, mais il peut se faire représenter par un fondé de pouvoir ou par un avocat.Une fois déposée , la déclaration de cessation des paiements peut toujours être retirée tant que le jugement prononçant la faillite n’a pas été rendu , si le commerçant prouve qu’il a repris ses paiements ou qu’il a trouvé des ressources pour reprendre ses affaires.
Le droit qui appartient à tout commerçant de provoque sa propre faillite bénéficie-t-il aux héritiers d’un commerçant en état de cessation de paiement ?L’article 219 du code de commerce le permet expressément .Dans ce cas de figure , le tribunal doit être saisi par déclaration de l’héritier dans un délai d’un an à compter du décès
1-2-2-2 - Faillite demandée par les créanciers
Pour être recevable à demander la mise en faillite d’un commerçant, il faut être créancier de ce commerçant (art.216 C.com.) , et cette qualité de créancier doit être justifiée par titre ou par tout autre mode de preuve. Le créancier doit saisir le tribunal par assignation selon les termes de l’article 216 du code de commerce .C’est donc par une requête introductive d’instance déposée au greffe du tribunal que l’affaire est portée devant le tribunal. Ce procédé de l’assignation induit la citation du débiter en tant que défendeur à l’instance et ce sous peine d’irrecevabilité de l’action.
Une fois saisi , le tribunal peut rejeter la demande si le demandeur ne justifie pas sa qualité de créancier , de celle de commerçant ou de personne morale de droit privé chez son débiteur et de la cessation de paiements par celui-ci ,sauf au demandeur de faire appel de ce jugement de rejet. Qu’en est-il du créancier qui renouvelle sa demande en déclaration de faillite suite au premier jugement de rejet devenu définitif ? Cette deuxième demande ne transgresse t-elle pas l’autorité de la chose jugée attachée à la première décision ? Suivant la doctrine et une ancienne jurisprudence, il ya lieu de faire une distinction. La première action a été rejetée parce que la cessation des paiements n’a pas été établie à cette date.Plus tard se produit une nouvelle demande dans laquelle les faits allégués comme constituant la cessation de paiements sont postérieurs à la première instance par exemple des dettes qui n’étaient pas alors échues sont venus plus tard à échéance et restées impayées. Dans cette hypothèse la deuxième instance repose sur une cause nouvelle, la nouvelle cessation de paiements ,cause pour laquelle il n’a pas encore été statué en justice. On ne saurait donc ici invoquer contre elle l’autorité de la chose jugée. A l’inverse si les faits allégués comme constituant la cessation de paiements sont antérieurs à la première action, la seconde doit être repoussée par l’exception de chose jugée. La même solution s’applique au cas où une nouvelle demande en déclaration de faillite est formée par un autre créancier alors que la première a été rejetée.
Le juge est-il obligé de prononcer la déclaration de faillite si le demandeur justifie et de sa qualité de créancier, et de celle de commerçant chez son débiteur , et de la cessation de paiement par celui-ci ? Il faut faire ici une distinction. Si le débiteur a satisfait aux obligations légales auxquels est assujetti le commerçant en cessation de paiement notamment les obligations des articles 215 à 218 du code de commerce notamment avoir fait sa déclaration dans les 15 jours et avoir joint à cette déclaration le bilan et les documents comptables , seule le règlement judicaire est prononcé ( article 226 al.1 C.com.).Mais si le débiteur n’a pas satisfait à ses obligations légales , a exercé sa profession contrairement à une interdiction prévue par la loi ,ou si sa comptabilité est occulte , c’est la faillite qui est prononcée ( art 226 al. 2 C.com.).
1-2-2-3 - Faillite déclarée d’office par le tribunal
En vertu de l’article 219 alinéa 2 du code de commerce , le tribunal peut se saisir d’office pour prononcer la faillite du commerçant. Quoique très rare , ce cas de figure peut se présenter si le tribunal a connaissance de la cessation des paiements d’un commerçant. Cette connaissance peut résulter de diverses manières , par exemple par la notoriété , par la fuite du commerçant, par un avis officieux du parquet qui s’est aperçu de la cessation des paiements au cours d’une instance pénale pour escroquerie ou abus de confiance. Il peut aussi se présenter le cas où le tribunal , rejetant une demande en déclaration de faillite parce que le demandeur ne prouve pas sa qualité de créancier ,ait la preuve de la cessation de paiements. Le tribunal peut aussi transformer d’office le règlement judicaire précédemment ouvert en faillite ( art. 336 et s. C.com.).En outre l’article 219 du code de commerce limite à une année à dater du décès , le délai pendant lequel le tribunal peut rendre d’office un jugement déclaratif de faillite.
1-2-3 - Contenu , caractère du jugement déclaratif de faillite
L’objet principal du jugement du tribunal est la déclaration de faillite. Le jugement de faillite nomme le juge commissaire ( art. 235 C.com.) , le syndic- administrateur (art. 9 ordonnance 93-23 du 09/07/1996) et prescrit certaines mesures relatives aux biens et à la personne du failli telles l’oppositions des scellés ( art.258 C.com.).Le jugement déclaratif de faillite détermine la date de cessation des paiements qui peut être antérieure au prononcé du jugement de dix huit mois au maximum , et à défaut de détermination de cette date celle-ci est réputée avoir lieu à la date du jugement (art. 222 et 247 al.2 C.com.).Le tribunal peut toujours modifier la date de cessation des paiements par une décision postérieure ? mais dans la limite de 18 mois ( art. 248 C.com.).
La fixation de la date de la cessation des paiements a une très grande importance pratique car c’est elle qui détermine les limites de la période suspecte au cours de laquelle les actes accomplis par le failli sont nuls de plein droit ou annulables (art.241 et 251 C.com.)
A la différence des jugements ordinaires qui n’acquièrent que l’autorité relative de la chose juge ,le jugement déclaratif de faillite produit ses effets à l’égard de toute personne même non partie à l’instance ; cette règle est implicitement édictée par l’article 228 du code de commerce qui organise la publicité pour prévenir tout le monde , ainsi que par l’article 231 de même code qui admet l’opposition par toute partie intéressée à compter la formalité de publicité. Le jugement est exécutoire par provision nonobstant opposition ou appel ce qui évitera le détournement de l’actif par le débiteur (art. 227 C.com.).
1-2-4 - les effets du jugement déclaratif de faillite
Les effets du jugement déclaratif de faillite sont multiples et énumérés dans le chapitre 5 du code de commerce (art.242 à 279)
1-2-4-1 -Dessaisissement
L’article 244 du code de commerce indique que : « Le jugement qui prononce la faillite emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le failli de l’administration et de la disposition de ses biens, même ceux qu’il peut acquérir à quelque titre que ce soit,tant qu’il est en état de faillite ».Le failli ne peut donc faire aucun acte relatif à ses biens ;c’est le syndic-administrateur judiciaire qui vient prendre sa place et gérer ses biens jusqu’au moment où la faillite recevra la solution adéquate prévue par le code de commerce.Les créanciers sont ainsi dès le prononcé du jugement protégés contre les actes de leur débiteur susceptibles de diminuer leur gage.
De ce dessaisissement découle un effet important qui est celui de rendre inopérant toute aliénation des biens du failli à compter du jugement déclaratif de faillite , et la vente ne peut être opposée au syndic .A contrario si le débiteur a procédé par exemple à la vente d’un immeuble, et que cette vente a été transcrite avant le jugement déclaratif de faillite, l’acheteur est en droit de revendiquer cet immeuble.
L’article 244 du code de commerce mentionne « les biens »sans autre précision. Est-ce à dire que tous les biens du failli sont saisissables sans aucune exception ?L’article 636 du code de procédure civile et administrative énumère les biens qui ne peuvent être saisis pour des raisons humanitaires ; il s’agit essentiellement du coucher nécessaire au saisi , les livres nécessaires aux études et à la profession du saisi et ses outils de travail et certains articles ménagers. Ces biens sont-ils insaisissables en cas de faillite ?Assurément non puisque le code de commerce prévoit des dispositions spéciales en cette matière qui doivent remplacer celles du code de procédure civile et administrative .L’article 260 du code de commerce dispose que le juge-commissaire peut sur la demande du syndic le dispenser de faire placer sous scellés ou l’autoriser à en extraire les objets mobiliers et effets nécessaires au débiteur et à sa famille , les objets soumis à dépérissement prochain ou à dépréciation imminente et les objets nécessaires à l’activité professionnelle du débiteur ou à son entreprise si la continuation de l’exploitation est autorisée.
Le failli étant dessaisi de l’administration et de la disposition de ses biens qui constituent le gage de ses créanciers , il ne peut faire aucun acte en rapport avec ses biens , et de ce fait ne peut intenter une action judiciaire ni défendre dans un procès .C’est ce qu’indique l’article 244 alinéa 2 du code de commerce : « Les droits et actions du failli concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la faillite par le syndic ».
Si le failli ne peut engager une action principale , il peut par contre intervenir dans l’instance engagée par ou contre le syndic , comme il peut faire tous actes conservatoires de ses droits ( art . 444 al.3 C.com.)
1-2-4-2 Suspension des poursuites individuelles par les créanciers du failli
Le but de la faillite est de mettre sur le même pied d’égalité tous les créanciers du failli de telle sorte qu’aucun n’ait un avantage sur l’autre , aussi la loi a chargé le syndic de procéder à une liquidation collective et de repartir proportionnellement entre tous les créanciers auxquels un délai est donné pour produire le montant de l’actif. Toute autre voie d’exécution est prohibée quant bien même le créancier est muni d’un titre exécutoire. Cette règle est formulée expressément par l’article 245 du code de commerce : « Le jugement qui prononce le règlement judiciaire ou la faillit emporte suspension de toute poursuite individuelle des créanciers faisant partie de la masse. A partir de ce jugement ,sont en conséquence suspendues toutes voies d’exécution tant sur les immeubles que sur les meubles de la part des créanciers dont les créances ne sont pas garanties par un privilège special,un nantissement ou une hypothèque sur lesdits biens. Les actions mobilières et immobiliers et les voies d’exécution non atteintes par la suspension, ne peuvent plus être poursuivies ou intentées dans la faillite que contre le syndic ».
Echappe donc à la suspension des poursuites individuelle le créancier ayant hypothèque , nantissement ou privilège. Le créancier dans ces cas a le droit d’être payé de préférence aux autres créanciers. Il ne est de même du créancier gagiste qui a le droit de se faire rembourser sa créance en vendant le meuble donné en gage ( art. 293 C.com.).
1-2-4-3 Exigibilité des dettes à terme du failli
Cet effet est indiqué par l’article 246 alinéa 1 code de commerce : « Le jugement qui prononce la faillite ou le règlement judicaire rend exigibles, à l’égard du débiteur ,les dettes non échues ».Par souci d’égalité entre les créancier d’une même faillite, même le créancier qui a accordé un terme à son débiteur est recevable à revendiquer sa créance quant bien même le délai de remboursement n’est pas expiré. L’artiche 246 du code de commerce dispose que c’est seulement à l’égard du débiteur c'est-à-dire du failli que ses dettes deviennent exigibles .L’exigibilité anticipée ne peut donc être opposée aux tiers qui se serait obligé avec lui. Il serait effectivement illogique et injuste de faire supporter à ces tiers un comportement ou une situation qu’ils n’ont pas assumés. Vis à vis de ces tiers l’engagement continue de subsister tel qu’il a été contracté. Les termes de l’article 246 étant généraux , l’exigibilité s’applique à toutes les dettes sans distinction aussi bien aux dettes civiles qu’aux dettes commerciales ainsi qu’aux dettes hypothécaires , privilégiées ou chirographaires .
La dette à terme devient donc en application de l’article 246 du code de commerce immédiatement exigible , mais cette règle ne donne pas droit aux créanciers d’exercer des poursuites individuelles sur les biens du failli car le jugement déclaratif de faillite suspend par lui même ce droit .Quid des créanciers qui échappent à la suspension des poursuites à l’instar des créanciers ayant hypothèque ou privilège ?.Peuvent-ils exercer des poursuites individuelles sur l’immeuble du moment que leur créance à terme étant devenue exigible ?Sans aucun doute oui du moment que ces créanciers ne sont pas concernés par la règle de suspension des poursuites individuelles posé par l’article 245 du code de commerce.
2 -Autorités et personnes ayant un rôle dans la faillite
2-1 - la section commerciale du tribunal
La faillite étant traitée par le code de commerce , c’est donc la section commerciale du tribunal qui est compétente en cette matière ( art. 531 et 532 C.p.c.a. ).L article 32alinea 7 du code de procédure civile et administrative indique que ce sont les pôle s spécialisés siégeant au niveau de certains tribunaux qui sont compétents pour connaître des contentieux relatifs à la faillite. Mais ces pôles n’étant pas encore opérationnels, c’est la section commerciale du tribunal de l’ouverture de la faillite ou du lieu du siège social qui est compétente. Rien dans les disposition du code de commerce ne fait échapper à la section commerciale du tribunal la compétence de régler un contentieux déterminé en rapport avec le processus de la faillite Exceptionnellement, il peut arriver que certaines questions soient du ressort du tribunal autre que la section commerciale saisie de la faillite .Dans ce cas, la section commerciale doit surseoir à statuer jusqu’au règlement de cette question par le juridiction compétente ( art. 324 C.com.) .
2-2- le juge- commissaire
Une fois la procédure de faillite engagée devant le tribunal ,il sera désigné un juge-commissaire qui sera chargé de surveiller est de contrôler les opérations et la gestion de la faillite. Contrairement à la législation française ce juge -commissaire n’est pas désigné par le tribunal saisi de la faillite parmi ses membres, mais il est désigné par ordonnance du président de la cour sur proposition du président du tribunal , ce qui sous entend que ce juge n’est pas celui qui compose le tribunal saisi .Cette ordonnance de désignation est rendu au début de chaque année judiciaire ( art. 235 C.com.).Comme tout juge,le juge-commissaire peut être récusés pour l’une des causes mentionnés dans l’article 241 du code de procédure civile et administrative.
Les fonctions du juge-commissaire peuvent être résumées en cinq chefs : 1°) l’article 235 alinéa 2 du code de commerce dispose qu’il est chargé spécialement de contrôler les opérations et la gestion de la faillite. S’il ne peut révoquer le syndic-administrateur judicaire qui est du ressort du tribunal, il peut par contre proposer au tribunal cette révocation 2°) il est parfois appelé à autoriser certains actes que le syndic ne peut faire seul : vente des objets soumis à dépérissement ou à dépréciation ( art. 268 C.com.),ventes aux enchères publiques des effets mobiliers ou marchandises ,compromettre et transiger sur toutes les contestations qui intéressent la masse ( art. 270 C.com ) , continuation de l’exploitation de l’entreprise ou recouvrement des effets ou créances exigibles ( ( art. 273 C.com ) ).Pour autoriser le syndic , le juge commissaire rend une ordonnance 3°) le juge-commissaire statue sur certaines contestations notamment lorsqu’il s’élève des réclamations contre les opération des syndics ( ( art. 239 C.com ) ),réclamations qui peuvent être soulevés par des créanciers ,par le failli lui-même, par un des syndics contre l’autre 4°)le juge commissaire doit faire obligatoirement au tribunal un rapport de toutes les contestations que la faillite peut faire naitre ( art. 235 al.4 C.com ).L’inobservation de cette formalité qui est d’ordre public entraine la nullité du jugement rendu.Le juge doit donc veiller à ce que son jugement mentionne expressément l’accomplissement de cette formalité
2-3- le ministère public
Le ministère public n’intervient pas directement dans les opérations de faillite , il a seulement une sorte de droit de contrôle destiné à réprimer les infractions en rapport avec la faillite. Ainsi le secrétaire greffier doit adresser immédiatement au procureur de la république du ressort un extrait des jugements prononçant la faillite (( art. 230 C.com ) ). Le compte rendu sommaire de la situation apparente du débiteur établi par le syndic doit être transmis des sa réception par le juge commissaire au procureur de la république ( art. 247 C.com ).
2-4- le syndic –administrateur judiciaire
Le jugement déclaratif de faillite aura pour effet d’une part la soustraction au failli de l’administration de son patrimoine , et d’autre part enlève aux créanciers le droit de poursuivre leur débiteur. Mais avant que l’action en faillite ne débouche sur un règlement définitif, il y aura nécessairement des actes à accomplir , des mesures urgentes à prendre , aussi il faut donner au failli un représentant qui va agir en son nom pour par exemple opérer des recouvrements ou continuer l’exploitation de l’entreprise ou du fonds de commerce. Ce représentant est le syndic-administrateur judicaire appelé communément le syndic .D’autre part et du fait que les poursuites individuelles par les créanciers étant désormais interdits , il est nécessaire que quelqu’un prenne en charge l’exercice de leurs droits ,veuille à la conservation de leur gage , et prenne les dispositions susceptible d’éviter la diminution de l’actif jusqu’à l’aboutissement des opérations de faillite. Il faudra ensuite distribuer l’actif entre ces créanciers .Il ya là donc un ensemble d’opérations longues et compliquées auquel pourra seul se livrer le représentant que le jugement déclaratif de faillite leur désignera et à partir de ce jugement leurs intérêt se trouvent ainsi concentrés entre les mêmes mains. Les créanciers formeront ainsi une masse et à cette masse la loi donne comme représentant le syndic.
L’article 2 de l’ordonnance n°96-23 du 09/07/1996 relative au syndic-administrateur judiciaire indique que : « Le syndic-administrateur judiciaire est chargé de représenter les créanciers ou de procéder éventuellement à la liquidation d’une société commerciale déclarée en faillite ».L’article 4 de la même ordonnance dispose que : « Le jugement qui prononce la faillite désigne le syndic-administrateur judiciaire parmi les personne inscrite sur la liste établie par la commission nationale ».
Les syndics sont des mandataires judicaires ce qui implique qu’ile ne sont pas des fonctionnaires publics ni des officiers publics mais leur mission a un caractère de service public ,aussi il est fait application de l’article 144 du code pénal qui punit l’outrage à un officier public. De cette qualité de mandataire découle une responsabilité des fautes commises dans l’accomplissement de leur mandat conformément au droit commun. Les syndics étant mandataires,ils doivent rendre compte à leurs mandants de la gestion qui leur a été confiée. Ces comptes seront fournis dans l’assemblée de concordat d’où sortira la solution de la faillite. Ces comptes seront soumis tant aux créanciers qu’au failli puisque le syndic est aussi chargé d’administrer le patrimoine du failli. Même si ni le code de commerce ni l’ordonnance du 9 juillet 1996 ne prévoit expressément la possibilité de révoquer le syndic, rien n’empêche que les créanciers ou même le failli puisse saisir le tribunal d’une telle demande si elle est fondée sur des motifs sérieux et ce du moment que le syndic est un mandataire.
2-5- Créanciers et contrôleurs
Du fait que les actions individuelles en paiement sont suspendues à partir du jugement déclaratif de faillite, les créanciers n’ont qu’une action individuelle très restreinte pour récupérer leurs créances.Ils peuvent agir pour faire constater l’existence et le montant de leurs créances en produisant leurs titres et en intervenant dans la procédure spéciale de vérification et d’affirmation des créances ( art. 280 et s. C.com.).Individuellement les créanciers peuvent contester la faillite et la fixation de la date de la cessation de paiement (art ; 231 et 233 C.com.).Il ont le droit de surveiller la gestion du syndic et de former des réclamations contre ses actes (art. 239 C.com.)
Tous les créanciers forment une masse dont le représentant légal est le syndic-administrateur judiciaire. L’expression « masse » qu’utilise le code de commerce n’est pas une personne morale , mais elle désigne seulement la collectivité des intérêts communs à tous les créanciers .Elle est représentée par le syndic. La masse étant donc représentée par le syndic, chacun des créanciers qui la composent est réputé avoir été partie à tous les procès engagés par ou contre le syndic , et par suite elle n’est pas recevable à à former une tierce opposition au jugement rendu contre la masse. Mais cette règle s’applique au seul créancier chirographaire et ne s’applique pas au créancier privilégié ou hypothécaire.
Le législateur a voulu donner plus de garantie tant aux créanciers quant au bon déroulement des opérations de faillite. Aussi il a reconnu à ces derniers le droit de surveiller les opérations du syndic. A cette fin il a institué des contrôleurs ( art. 240 et 241 C.com.).C’est au juge-commissaire que la loi a confié la prérogative de nommer par ordonnance un ou deux contrôleurs parmi les créanciers .Ces derniers sont spécialement chargés de vérifier la comptabilité et l’état de situation présentés par le débiteur et d’assister le juge-commissaire dans sa mission de surveillance des opérations du syndic. Ces contrôleurs peuvent être révoqués à tout moment par le juge-commissaire.
2-6 - le failli
Bien que le failli soit dessaisi de l’administration de son patrimoine , il joue un certain rôle dans la procédure de faillite. Ainsi il assiste aux opérations de clôture des livres pratiquées par le syndic (art. 253 C.com.) ;il assiste à l’ouverture des lettres qui lui sont adressées et dont la remise au syndic est prescrite(art. 261al.3 C.com.) ;il assiste à l’inventaire de ses biens que les syndics ont à dresser après leur nomination ((art. 264 C.com.) ) ;il assiste à la vente aux enchères des effets mobiliers ou marchandises pratiqués par les syndics((art. 269 C.com.) .Le failli peut aussi obtenir l’allocation de secours (art. 242 C.com.).
Il y a lieu maintenant d’exposer la procédure destinée à préparer la solution de la faillite.Ce sera le sujet de la deuxième partie.
Maitre Mohamed BRAHIMI
Avocat à la Cour
Cité Si Lahlou,Bouira 10000 Algérie
brahimimohamed54@gmail.com