L’instruction en procédure administrative s’entend de l’ensemble des actes émanant des parties ou du juge tendant à formaliser le dossier avant son renvoi devant la formation de jugement.Il peut s’agir par exemple de l’échange des mémoires,de l’échange des pièces produites ou des mises en demeure ou injonctions notifiées par le juge.Tous ces actes doivent être produits ou exécutés au niveau du greffe du tribunal administratif sous la supervision du juge rapporteur le tout avant le tenue de l’audience.Cette procédure de l’instruction qui précède l’audience est prévue par les articles 838 à 857 du code de procédure civile et adminsitrative.Ces dispositions sont d’ordre public au sens où leur violation ou leur méconnaissance entraîne la l’irrégularité du jugement rendu.
Pour revenir au dossier de l’affaire du Groupe El Khabar portée devant la formation du tribunal statuant au fond,il est incontestable que ce dossier devrait impérativement suivre le cheminement de la procédure y afférente c'est-à-dire faire l’objet d’une instruction qui en principe est confiée à un juge rapporteur qui n’est autre qu’un membre de la formation du jugement appelé à statuer sur le dossier et ce conformément à l’article 844 du code de procédure civile et administrative .Il revient donc à ce magistrat rapporteur de sommer les défendeurs ( en l’espèce les avocats du Groupe El Khabar ) de déposer le mémoire en réponse à la requête introductive d’instance introduite par le ministère de la communication et incidemment fixer le délai dans lequel ce mémoire doit être produit .Il revient aussi à ce magistrat rapporteur de demander aux parties de produire toute pièce ou document utile à la solution du litige.Enfin , une fois l’affaire en état d’être appelée à l’audience , le magistrat rapporteur doit transmettre le dossier au commissaire d’Etat pour conclusions et c’est suite à cette formalité que le président de la formation de jugement doit diligenter une procédure relativement complexe qui doit précéder la mise en délibéré de l’affaire.
Quand le rapporteur décide que l’affaire est en état d’être appelée à l’audience et qu’il a transmis dossier au commissaire d’Etat pour conclusions, une deuxième procédure s’ouvre.Le président de formation du jugement ( et non le juge rapporteur) doit rendre une ordonnance non susceptible d’appel qui fixe la date à partir de laquelle l’instruction est close et cette ordonnance doit être notifiée à toutes les parties par lettre recommandé avec accusé de réception ou par tout autre moyen 15 jours au moins avant la date de la clôture fixée par cette ordonnance.A supposer que la date de clôture de l’instruction a été fixée pour le 15 juillet 2016 , les parties à l’instance doivent être tenu au courant de cette date avant le 30 juin 2016 .Dans l’hypothèse où le président de la formation de jugement n’a pas pris une ordonnance de clôture , la loi prévoit un autre mécanisme .L’instruction dans ce cas est close 03 jours avant la date de l’audience indiquée.Si par exemple l’audience a lieu un mercredi,l’instruction est close le samedi à minuit.Après la date de clôture de l’instruction les parties ne peuvent plus produire de mémoires mais s’il s’agit de conclusions nouvelles ou de moyens nouveaux , la formation de jugement peut les accepter mais seulement après avoir ordonner par ordonnance la continuation de l’instruction ( art 854 et 855 du CPCA).
Telle est la procédure que doit suivre une instance pendante devant le tribunal administratif.Concernant l’affaire du Groupe El Khabar qui a déjà été jugée par la formation statuant en référé ayant rendu une ordonnance définitive le 15 juin 2016 en faveur du ministère de la communication , une ordonnance qui n’est susceptible d’aucune voie de recours conformément à l’article 936 du CPCA, il est indéniable que rien ne permet d’envisager une procédure d’instruction au fond autre que celle indiquée.Il n’y a aucun motif à retirer au juge rapporteur ses prérogatives légales en matière d’instruction.Meme s’il s’agit de la production du mémoire en réponse à l’action au fond engagée par le ministère de la communication, l’ordre de dépôt de ce mémoire doit émaner du seul magistrat rapporteur et c’est ce dernier qui doit fixer le délai imparti pour ce dépôt.Se substituer au rapporteur , même s’agissant du président du tribunal administratif lui-même peut constituer une entorse à la loi qui pourrait être censuré et entraîner l’irrégularité du jugement rendu au fond.
Il est v rai que la loi permet sous certaines conditions au président du tribunal administratif de renvoyer directement le dossier devant la formation de jugement sans qu’il y ait lieu à instruction.Mais ce pouvoir est exercé sous certaines conditions.Il doit s’agir d’un litige dont la solution est déjà certaine ce qui est loin d’être le cas de l’affaire en cause qui soulève des questionnements factuels et juridiques complexes.En outre cette procédure est appliquée sans qu’il y ait lieu à production du mémoire en réponse par le défendeur et doit être suivie par la transmission du dossier au commissaire d’Etat .Ordonner au défendeur de produire son mémoire en réponse c’est reconnaître qu’une instruction a été ouverte et cette instruction devrait par conséquent être confié au seul magistrat rapporteur.
Maitre M.BRAHIMI
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